20 novembre 2006
de Rabelais à Kaamelott
Un truc qui m’a toujours gonflé, dans le film ou le roman historique, c’est les personnages qui causent qu’en subjonctif.
Ca fait déjà un moment qu’on se doute que dans Chrétien de Troyes, il y a une bonne dose de pipeau. Que les chevaliers étaient pas des p’tits chienchiens à leur réreine. On se doute aussi que l’argot et la différenciation entre le langage parlé et le langage écrit ne date pas d’hier. Ne serait-ce que parce qu’un ou deux guignols venus du trou du cul du temps on écrit des bouquins en langage parlé.
Et pourtant, dans n’importe quel bouquin ou film pourrave, on continue à faire jacter tout ce qui a plus d’un siècle comme s’il avait fait des études d’académicien. Ce qui est d’ailleurs un peu con, parce que tout le monde sait que pour être académicien, c’est pas une question d’études : il suffit de coucher (sur papier…).
J’aime bien Ellroy, parce que ses personnages causent comme ils doivent causer, contrairement à Agatha Christie et autre littérature de couvent. Et bien dans l’historique, c’est comme dans le polar. Les dialogues subjonctés nuisent à la crédibilité des personnages ! C’est pour ça (entre autre) que j’avais jugé que Rouge Brésil était une bouse : les dialogues étaient incohérents avec la position des personnages (genre le marin qui t’aligne les plus-que-mon-cul de l’impératif).
Et c’est pour ça que Kaamelott est un progrès considérable dans la représentation que l’on a du Moyen Age (éventuellement mythologique). On nous présente enfin des gros bourrins médiévaux qui causent comme des gros bourrins médiévaux. Enfin, un auteur nous montre que c’est pas parce que les bouquins sur ces gens étaient retranscrit par des moines, qu’ils parlaient comme des enfants de choeurs.
Ca devrait être obligatoire en cours d’histoire, et on devrait filer aux auteurs la médaille des Arts et des Laides !
18 novembre 2006
Lira, lira pas…
Bon, ça commence à me fatiguer… Depuis un mois, je me tâte pour lire les Bienveillantes, ou non.
Les arguments pour :
- un mec m’a dit que ça se lisait bien sur les deux premiers tiers.
- la curiosité.
- j’ai bien aimé un des bouquins du papa.
- Christine Angot n’aime pas.
Les arguments contre :
- à part Harry Potter, j’ai détesté tous les romans “que tout le monde lit dans le métro”. Et c’est en passe d’en être un.
- j’ai pas aimé les goncourts que j’ai lu.
- … et le dernier bouquin lu qui était dans les deux dernières catégories, c’était rouge brésil. Je préfèrerais lire un Brigade Mondaine plutôt que de resubir ça.
- si ça se trouve, Christine Angot aime bien, mais elle l’a descendu par intérêt.
Bon. Je ne cède pas !
PS : Harry Potter mérite un goncourt !
16 novembre 2006
Foutaise 2.0
Le Web 2.0, on ne parle que de ça. Ca serait la nouvelle bulle de pèze, le lot de consolation pour ceux qui étaient trop cons ou trop jeunes pour devenir milliardaires au premier round. Ou alors, c’est du vol. C’est la deuxième partie d’une arnaque en deux temps. On s’est fait gruger lors de la soi disant révolution internet, et maintenant, on essaie de nous revendre ce qu’on nous avait initialement chouravé.
Avant
Avant la bulle internet, le web c’était simple. T’avais trois balises à connaître, et tu faisais ta page où tu racontais ta daube en vert sur fond orange, police Arial. C’était pas compliqué. C’était pas communautaire, mais personne n’en avait rien à branler, vu que le communautaire était ailleurs. Dans Usenet qui se rapproche de l’usage qu’on a aujourd’hui des forums et wikis communautaires, ou des Listservs pour les communautés et groupes plus confidentiels ou moins organisés.
Il y avait aussi les gros FTP anonymes avec up/download pour partager les fichiers (sans violation de copyright, grâce aux modérateurs), IRC, et tout un tas d’autres protocoles et outils permettant de faire tourner des communautés. D’ailleurs c’est normal, puisque dans les gros utilisateurs du net à cette époque, on trouvait les anciens utilisateurs des BBS dont les fondements sont avant tout communautaires.
Mais à cette époque, Internet avait mauvaise réputation : ce modèle ne pouvait qu’être louche. France Telecom et Microsoft luttait contre, et les deux avaient intérêt à le rendre difficile à utiliser, et les deux en avaient le pouvoir (et les deux l’ont fait). Les FAI n’avaient pas pignon sur rue. Malgré tout, c’était communautaire. Mais ces communautés ne dégageaient pas de fric. Et c’était tant mieux.
la Révolution
Ensuite, est venue la révolution internet. Du point de vue de ceux qui ne connaissaient pas, c’était une révolution. Du point de vue de ceux qui étaient sur place, c’était la Réaction. La fin de l’âge d’or. Les bottes de l’envahisseurs qui frappaient les pavés des ruelles de l’information. Même techniquement, c’était pas beau à voir : avant, les protocoles étaient ciselés, après, ils sont devenus lourds, grossiers et complexes.
Y’a qu’a voir la gueule d’HTML avant et maintenant. Avant, c’était aussi simple à écrire à la main que les languages de balises pour Wiki d’aujourd’hui. Maintenant, c’est devenu imbitable, avec je sais pas combien de standards, et AUCUN navigateur qui ne les implante correctement. Mais maintenant, c’est sans doute mieux : tout site web peut respecter la dernière charte graphique de l’entreprise !
Donc le bizness est arrivé. Ecrasant tout sur son passage. Normalisant le spam (qui était jusqu’alors considéré comme une déviance suffisante pour justifier un appel au boycott de celui qui s’en rendait coupable), et piétinant au passage ce nouveau civisme créé pour l’occasion qu’était la “netiquette”.
Et puis comme le bizness était malgré tout habitué à ses vieux modèles paternalistes, dictatoriaux, et unidirectionnels, tout ce qu’il ne pouvait pas contrôler a été rasé (ou presque) ou est tombé de lui-même en décrépitude. Et ça a inclu les haut lieux de la vie communautaire sur le net.
les Conséquences
Que nous a apporté cette révolution ? A ceux qui étaient déjà là ? Pas grand chose, à part le développement de services online (banque, administration, achats, etc.) qui n’auraient pas été rentables sans l’afflux de monde.
Ceux qui sont arrivés suite à cela ? Eux n’y ont pas gagnés non plus. Cette révolution n’a rien simplifié, elle a juste eu, avec la propagande qui y a été associée, un effet désinhibiteur sur les gens, qui ont enfin compris qu’ils pouvaient s’y mettre.
Ceux qui y ont réellement gagné, c’est ceux qui ont fait du fric, et la couverture de Challenge. C’est pas les usagers.
Bon, il faut quand même admettre qu’il y a eu des avantages. Tout ce beau pognon a quand même permis de financer l’augmentation du diamètre des tuyaux, sans laquelle on ne ferait pas aujourd’hui passer de la vidéo ni de la musique. Mais même si le gain est important, je ne suis pas sûr qu’il équilibre la perte de l’innocence, voire la destruction de la TAZ (même si je n’ai jamais complètement adhéré à ce concept, on ne devait pas en être très loin).
le “Web communautaire”
La mue est achevée. Fini l’internaute passif, vive l’Internet collaboratif.
Challenges, nov. 2006
Après avoir étouffé d’internet tout ce qu’il ne maîtrisaient pas, pour en faire une énorme machine à cracher du blé, ils reviennent pour la deuxième razzia. Ce coup-ci, ils ont compris comment générer du profit à partir de ce net bidirectionnel. Alors ils l’autorisent à nouveau. Sous leur contrôle, cette fois.
Il y a autour de 10 ans, un patron de Procter & Gamble disait que, de même qu’ils avaient fait la radio et la télévision à leur image, ils feraient internet à leur image.
Ils ont réussi.
14 novembre 2006
la Hiérarchie : Partie 3 - la perfection se rapproche
Dans l’épisode précédent, j’ai montré deux représentations différentes de hiérarchies. La première était particulièrement adaptée pour identifier l’importance des individus dans l’entreprise, en se basant sur la distance à la Source de Tout Pouvoir, l’actionnaire. La seconde approche était plus adapté à l’étude des relations entre plusieurs individus.
Voyons maintenant commment par une astucieuse synthèse entre ces deux visions, nous pouvons nous rapprocher de la perfection.
Principe : le modèle généalogique, avec présentation de l’ascendance et des évnetuels hauts faits (personnels et de ses supérieurs). Bard style, quoi !
Exemples :
- “Je suis Robert, fils de Myriam la Rouge, directrice du personnel, elle-même petite fille du président William aux Dents Longues, qui terrassa la concurrence, et dont la bouche chante le Chant de la Source de Tout Pouvoir.”
-
“Je suis Danton le Dresseur de Codeurs, qui vainquit le code de AppliPourrieSousTraitée v2.0. Je suis le fils de Gudule, la Porteuse d’Emmerdes, elle-mème fille de Rodolphe, le Grand Valideur. Par leur voix je parle, et par mon bras ils agissent !”
Avantages :
- Ca fait grave classe !
- Ca se passe comme dans la boîte à Dédé !
- On voit tout de suite qui est influent.
- Parfait pour établir les relations relatives, commes absolues.
Inconvénients :
- Les débuts de réunions peuvent être un peu longs.
- Les clients hallucinent.
- Les cartes de visites sont au format A4 (mais en parchemin).
Comme quoi, les anciens savaient ce qu’ils faisaient !
Rumeur
Selon des sources bien informées, Zidane aurait couché avec tout le monde, sauf Nadyia. Celle-ci dément.
12 novembre 2006
la Hiérarchie : Partie 2
Voici donc la suite de notre discussion sur les modèles de hiérarchie. Aujourd’hui, un modèle absolu et un modèle relatif.
Distance à l’actionnaire majoritaire
Principe : on se contente d’attribuer aux gens un entier, qui est la distance à l’actionnaire majoritaire. C’est facile, si mon chef est n, je suis n+1.
Exemple : Salut, je suis Danton, de rang 7. Et voici mon stagiaire, de rang 8.
Avantages : C’est super simple, et c’est absolu. Ca traduit réellement la proximité au pouvoir (du moins théorique : il y a toujours le cas des gens ayant l’oreolle du chef, bien que bas dans la hiérarchie).
Inconvénients : c’est insuffisant pour exprimer les relations entre les gens. C’est clairement pas parce que tu as un numéro plus bas, que tu peux faire ramper les autres. Surtout dans une boîtes où les services sont cloisonnés, et les chefs jaloux de leurs prérogatives. De plus, la hiérarchie peut être plus ou moins plate selon les services. Donc tu te retrouves avec la stagiaire de la com’ qui est au dessus du chef du département R&D. Mais cela dit, quand on y réfléchit, c’est peut être à juste titre au niveau du pouvoir décisionnel…
Modèle familial pur
Principe : utiliser le vocabulaire des relations familiales.
Exemple : ” - Salut, je suis Madeleine, ta cousine de la R&D.
- - Madeleine, la nièce de Paul, le responsable qualité ?”
Avantages :
- Tout le monde connaît le vocabulaire. Sauf peut être les trucs compliqués du genre “c’est mon stagiaire à la mode de Bretagne”.
- Accentue le côté “ta boîte, c’est ta famille, donc tu bosses beaucoup, pour pas cher, et tu écoutes la parole de tes aînés.”
Inconvénients :
- Le modèle pourrait être assimilé à l’entreprise paternaliste, ce qui n’est pas nécessairement lié. Du coup, ça donnerait un côté ringard (même si les valeurs familiales redeviennent soi-disant à la mode). Et ça rapproche dangereusement du “travail, famille, etc.”.
- Le modèle est pratique pour exprimer les relations relatives et locales dans l’entreprise, mais insuffisant pour situer les gens dans l’absolu.
Au prochain épisode, nous verrons comment combiner ces deux modèles pour aller flirter avec la perfection.
10 novembre 2006
la Hiérarchie : Partie 1, le modèle militaire
Dans ce patelin, on a un problème avec la hiérarchie. On n’arrive pas à se foutre dans le crâne qu’elle permet de représenter la volonté de l’actionnaire, transmettant Sa Sainte Parole d’oreille en bouche, et de bouche en oreille. Et que sans elle, on n’est rien. C’est pas de la mauvaise volonté, c’est juste qu’on manque d’intuition là-dessus, et ça nous handicape grave, en particulier par rapport à la montée de l’économie des pays orientaux, tendance confucianiste ou shintoiste, et eux, la hiérarchie, ils connaissent ça depuis tout petit. Et on voit le résultat : dans 10 ans, la Chine sous-traitera l’écriture de son code en Europe…
Entendons nous : nous savons tous quel comportement adopter avec notre chef, avec notre n+2, pour un grouillot, etc. Bref, pas de blèmes dans les cas simples. En revanche, dès qu’il faut savoir si t’es au dessus ou au dessous de la stagiaire du chef de département de la filiale Energies Cosmiques de ta boîte, rien ne va plus.
Cette série de notes a donc pour objet de présenter et d’étudier quelques systèmes pour pallier à ce problème.
Première partie : le modèle militaire
Principe : utiliser la terminologie militaire des grades et fonctions.
Avantage : le boulot de définition est déjà fait. Pas besoin de faire bosser la com. Et ça marche depuis 3k ans avec les succès que l’on connaît. Les noms sont simples, et comme les technicosses sont fan de films d’actions, ça va les brancher direct “mon général, mon général, j’ai logé l’auditeur ! il avance à couvert dans l’aile ouest du bunker !”.
Inconvénients :
- Bien que semblant idéal au premier abord, ça devient ingérable. En plus, les gauchos et syndicalistes de tout crin sont notoirement antimilitaristes, et ils ne vont jamais accepter ça.
- Le modèle militaire est beaucoup trop libéral et permissif pour pouvoir être utilisable dans une entreprise. Dans l’armée, la fonction l’emporte sur le grade. Ca permet par exemple à un appelé d’enseigner à un haut gradé le noble art de la lecture et de l’écriture sans craindre d’être puni à chaque fois qu’il le contredit. Ou encore au garde de la Salle des Missiles Méga-Nucléaires d’empêcher un caporal devenu fou d’entrer et de démarrer tous les missiles en les hackant avec sa calculatrice de chez Texas Instrument. Dans une boîte, ça marche pas comme ça, les choses sont beaucoup plus claires. Si un mec est ton chef, alors c’est ton chef. Tout le temps, dans toutes circonstances. Et tu fais ce qu’il te dit, tu penses comme il te dit (alors que dans l’armée, on peut penser comme on veut).
- C’est trop compliqué. Nous, les civils, on croit que c’est super simples, les grades et le tralala. Mais en fait c’est grave compliqué ! Il faut savoir comment saluer les gens quand ils rentrent avec un chapeau, comment leur parler si tu les croises au restau, comment hocher la tête si tu tiens des paquets lourds quand ils te saluent… Bref, on est trop con pour ça…
(à suivre)
7 novembre 2006
le Permanoob
Au cours de ma plongée dans le monde du MMORPG j’ai pu croiser à de nombreuses reprises ce personnage incontournable du MMORPG : le noob. Pourquoi est-il incontournable ? Déjà, si tu poses la question, c’est que t’es un noob ! Ahah !!
Le mot “noob” caractérise de façon péjorative le débutant dans un MMORPG (noob = newbie). Mais le terme s’utilise dans pas mal d’acceptations différentes.
- sur soi-même : “moaf tu sais, je suis qu’un noob“. Dans ce cas, ça veut dire “valeureux débutant plein de promesse”.
- sur un mec qui t’a défoncé la gueule : “gros noob, tu m’as eu juste parce que j’ai une gastro, que je répondais au téléphone à ma mère, et que je mangeais une pizza”.
- sur un mec à qui t’as défoncé la gueule : “faut vraiment être qu’un pov’ noob pour manger une pizza à Pepper Park, pour avoir un téléphone, et pour se torcher en jouant”.
- pour caractériser de façon clair du matos, une zone “ici c’est noob-land”, “c’est un noobgun ton truc, tu t’es fait rouler”.
Bref, assez vite, on se rend compte que c’est le terme le plus employé dans tout bon MMO. Mais jusque là, rien de très original.
Le point où je voulais en arriver est le concept dérivé : une sorte de noob de/dans l’absolu. Le permanoob ! Pas besoin d’en rajouter trois tartines, le permanoob, c’est juste un noob qui le restera ad vitam eternam. Une sorte de débutant dans tout, pour toujours. Bref, le mec irrécupérable.
C’est pas très charitable, mais on en connais quelques uns.
5 novembre 2006
Dans la boîte à Dédé…
Dans la boîte à Dédé, c’est pire que dans ta boîte. Dans la boîte à Dédé, le DG, est Chaotic Evil. Mais d’ailleurs, tous les managers, sont Chaotic Evil. Mais le DG, lui, c’est une liche. Pour ceusse qui connaissent pas, une liche, c’était un DG il y a super longtemps, quand la boîte était légendaire, et il a refusé de partir à la retraite. Il a utilisé tout son pouvoir (et les DG, pendant l’âge d’or, ils en avaient) pour devenir indéboulonnable. Et maintenant, c’est une liche, donc en plus il est hyper balaise et il a une armée de morts-vivants à ses ordres.
Mais dans la boîte à Dédé, y’a un truc qui est pire que d’avoir tous ses managers Chaotic Evil : c’est que tous les autres grouillots sont Lawful Good. “Oui M’sieur, on va bosser toute la nuit. Parce que c’est pour le bien de l’Entreprise. Et le bien de l’Entreprise, c’est le bien de Tous. D’ailleurs, ma femme a fait un cake aux olives, pour cette nocture !”.
Et surtout, dans la boîte à Dédé, le DRH est Lawful Evil. Il est dans sa tour, il voit tout, il sait tout, il contrôle tout.
La semaine prochaine, nous étudierons l’impact sur l’intéressement et la participation, quand on a un dragon rouge à la direction des finances.
Mais kessékça ?
J’inaugure aujourd’hui ma nouvelle idée : les homéonotes. Une homéonote, c’est une note où il y a une trace de concept, dilué dans 2 microgrammes de sucre.
Bref, ça sera utilisé les jours de flemme, ou de manque de courage pour développer un truc.